Il y a des héroïnes qui ne font pas la une des gazettes. Marie Durand était l’une d’elles. Cette femme protestante qui vécut au XVIIIe siècle, fut enfermée dans le Gard, à Aigues Mortes à la Tour de Constance durant 38 ans de sa vie. Son défaut? Etre protestante fille et épouse de prédicateur, dans un royaume catholique.
Née en 1711 elle vécut jusqu’en 1776, après avoir passé 38 années de sa vie enfermée dans la Tour de Constance. Un récit de sa vie sur ce lien. Si vous êtes en quête de figures de résistance féminines, la vie de Marie Durand devrait vous inspirer…
L’église du Vivarais tentait alors de se constituer et ses réunions étaient clandestines. Les Camisards français avaient agité les terres du Sud et le roi voulait que son royaume soit en ordre. Dans un tel contexte, Il n’était pas rare d’exercer sa foi clandestinement, il était également interdit aux femmes de prophétiser.
Marie Durand, sœur du pasteur Pierre Durand, naquit en 1711, dans le hameau du Bouschet de Pranles en plein Vivarais. La famille Durand soutenait clandestinement sa foi par la lecture quotidienne de la Bible.
Pierre Durand, né en 1700, jeune prédicateur, organisa une assemblée clandestine en 1719. Cette assemblée, dénoncée par un voisin, fut surprise par les soldats du roi. C’est alors que la mère de Pierre et Marie, Claudine Gamonet, disparut.
Pierre devait avoir un rôle important dans les Églises du Vivarais pour lesquelles il essayait de mettre en applications les décisions prises au Synode du Languedoc de mai 1721. Consacré en 1726, il est pasteur clandestin itinérant en Vivarais. Poursuivi, il échappe aux recherches pendant plusieurs années.
En 1729, afin de faire pression sur la famille, l’Intendant du roi fait arrêter le père, Étienne Durand, qui est emprisonné au fort de Brescou. Puis, en 1730, Marie et son mari, Matthieu Serres sont arrêtés. Celui-ci est envoyé au Fort de Brescou tandis que Marie, âgée de 19 ans, est emprisonnée à la Tour de Constance.
Pierre est finalement arrêté en 1732 et exécuté à Montpellier le 22 avril.
Après 38 années de prison dans la Tour de Constance, Marie est libérée en 1768 ; retirée au Bouschet de Pranles, elle mourra 8 ans plus tard en 1776.
Intégralité d’un article sur Marie Durand (ici).
Le mot ” résister” gravé dans la Tour, lui a été sans doute faussement attribué, mais il résume bien l’âme de cette croyante, dont la foi a été rudement mise à l’épreuve. Le texte qui suit, retrace de façon poétique la vie de cette croyante qui n’a rien sacrifié à sa foi.
Qu’il puisse vous inspirer…
RESISTER
Non, ce n’est pas ta lourde grille
ni ton mur noir,
sombre tour, funeste bastille,
que j’aime à voir,
mais ces traits qui par une femme
furent sculptés,
ce mot qui recouvre un long drame :
RÉSISTER
A genoux sous ces voûtes grises
j’ai retrouvé
ces quelques lettres indécises
sur le pavé
et j’ai pleuré, noble victime
des cruautés
en épelant ton cri sublime :
RÉSISTER
Lorsqu’elle vit, la femme austère,
la mort de loin,
elle voulut que cette pierre
fut son témoin,
et pour prévenir après elle
les lâchetés,
elle écrivit sur la margelle :
RÉSISTER
En ce temps-là dans son Versailles
le roi riait,
tandis qu’ici sous ces murailles
la foi priait,
l’un écrivait dans une fête :
Persécutez !
l’autre écrivait baissant la tête :
RÉSISTER
Et c’est toi qui fut la plus forte
vaillante foi;
depuis longtemps la femme est morte,
et mort le roi,
mais tandis que sceptre et couronne
sont emportés,
dans la tour ce vieux mot rayonne :
RÉSISTER !